Page:Lacaussade - Poésies, t2, 1897.djvu/66

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Ces tentes du néant, ces voûtes, ces tombeaux,
Où le bronze s’effeuille en funèbres flambeaux,
Où se marie autour des urnes et des arbres
L’éclat vivant de l’or à la blancheur des marbres.
Indigne et lâche honneur ! hommage immérité
Que rend le peuple à ceux dont il fut insulté.



Et quoi ! vouer trente ans au culte d’une idée ;
Âme d’un seul vouloir sans relâche obsédée,
User ses jours, ses nuits à chercher ton bonheur
Par les ardus sentiers d’un périlleux labeur ;
Convertir tant d’esprits aveuglés par la haine
Au large espoir d’une ère infaillible et prochaine ;
Aux abus tout-puissants forger le frein des lois ;
Enfanter un Conseil pour défendre tes droits ;
Saper des préjugés l’orgueilleuse démence ;
Et d’un noble avenir tant de noble semence,
Et le présent sauvé des douleurs du passé,
Et tant d’ardent amour à tes pieds dépensé,
Tout cela s’oublierait !… Ingratitude noire !
Oh ! c’est être sans cœur que d’être sans mémoire !
D’un torpide égoïsme il te faut éveiller,
O mon île ! Et qui t’a fait le droit d’oublier ?
Et d’où peut te venir tant de froideur insigne
Pour ceux que Dieu lui-même a marqués de son signe ?