Page:Lacaussade - Poésies, t2, 1897.djvu/99

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Que, s’ouvrant sur leur sort, noir de pluie et d’orage,
Ta royale faveur, arbre au fécond ombrage,
       Monta jusqu’aux fronts inspirés !

C’est à nous, fils du peuple, aux louanges opimes,
A nous, enfants des arts, déshérités sublimes,
A nous à qui tes bras se sont toujours ouverts,
De prier sur la pierre où tu dors sans couronne,
Et de faire à ta tombe, à notre tour, l’aumône
       Et de nos pleurs et de nos vers !

C’est à moi, luth en deuil, sur ces lointaines rives,
De répéter ton nom sur mes cordes plaintives,
D’effeuiller à tes pieds mes strophes et mes fleurs,
D’étoiler de mes vers ton linceul funéraire,
D’enrichir, à mon tour, ton urne cinéraire
       De l’humble obole de mes pleurs !

Va ! cette obole est pure, elle est sainte, elle est digne !
Pour ton cercueil absous c’est un triomphe insigne
Que ces larmes du fils du peuple au fils du roi !
Et tu vaincras l’oubli, toi qui peux - ô victoire ! -
Nous dire à nous, rêveurs, du haut de ton histoire :
       « Fils de la Muse, chantez-moi ! »

Oui, nous te chanterons ! mais la tête levée,
Dans la calme attitude au juge réservée,
La lyre sur le cœur et les yeux sur le ciel,