Page:Lacenaire, éd. Cochinat, 1857.djvu/171

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Le faussaire pria M. Prasson d’envoyer cet effet à l’encaissement, en lui annonçant qu’il repasserait à Beaune dans cinq à six jours en reprendre les fonds. C’était une manœuvre habile pour s’attirer la confiance du commerçant, puisque, le billet étant bon, Lacenaire savait que l’escompteur allait lui en compter immédiatement la valeur. Mais on verra plus tard pourquoi il agissait ainsi. Ce que le porteur de la traite avait prévu se réalisa.

— C’est inutile, lui dit M. Prasson après avoir considéré la signature du titre, je vais vous payer immédiatement.

— Comme vous voudrez, répondit le voyageur sans paraître pressé. Il paraît, ajouta-t-il après une pose, que vous connaissez cette maison ?

— Oh ! reprit le banquier, vous auriez pour vingt mille francs de ses valeurs à escompter, que je vous les prendrais à la minute.

Lacenaire grava cet avis dans sa tête et quitta Beaune immédiatement. Il se dirigea sur Genève par Lyon, en répandant d’innombrables faux sur les routes, et en reprenant le chemin de Paris, il laissa à Villefranche une partie de ses fonds et ne garda avec lui que quinze cents francs.

On n’a pas oublié qu’il avait promis à M. Prasson de revenir à Beaune dans cinq ou six jours. Il y retourna effectivement, ayant en portefeuille un effet faux de quatre mille francs, qu’il prétendait lui faire escompter. Mais, ce fut pour ainsi dire le doigt de Dieu qui poussa l’assassin de Chardon à tenter cette nouvelle escroquerie et à tenir sa parole.