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Page:Lacenaire, éd. Cochinat, 1857.djvu/259

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que antérieure au double assassinat reproché à Lacenaire et à Avril pour vous prouver que je n’en impose pas. En 1832, je fus amené à Poissy par un jugement à deux ans. Je travaillai dans le même atelier qu’Avril. Il était polisseur et moi mécanicien. Avril se trouva un jour pris en flagrant délit, en fabriquant un couteau pour son propre compte, ce qui est défendu à Poissy, puisqu’on ne doit travailler que pour l’entrepreneur. Le gardien Alliance lui demanda ce couteau qui était tout neuf ; Avril ne veut pas le rendre ; on descend chez le comptable ; une querelle s’engage. Avril frappe le gardien des pieds et des mains, puis il se précipite sur un grattoir, petite lime triangulaire de trois quarts, affilée sur les plats et dont les arêtes sont tellement vives qu’avec ces arêtes même on gratte les poignées de sabres pour les polir. Avril voulait plonger cet instrument dans le dos du gardien. Au risque d’encourir le mécontentement de mes camarades d’infortune, je sautai sur lui, et lui relevant le bras par derrière, je fis remonter l’outil qui me blessa légèrement au front. Je ne craignis pas d’aggraver ma position, quoique mes camarades s’écriassent que cela ne me regardait pas. Mais ce fait seul prouve que je n’en voulais pas à Avril.

J’aimais une femme, ma compagne, une nommée Stéphanie Certain. Elle avait été condamnée en 1831, le 22 septembre, comme ma complice, et était citée parmi celles qui se livrent de bonne heure au crime.

Cette femme m’écrivait souvent pour m’exhorter, dans les termes les plus énergiques, à ne pas perdre courage. Je fis part à Avril des lettres de Stéphanie. Je crois