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Page:Lacenaire, éd. Cochinat, 1857.djvu/84

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— Oh ! not’ bourgeois, dit l’automédon en bâillant à se désarticuler la mâchoire ; c’est impossible ! Jeannette ne pourra plus aller, elle est surmenée, quoi ! et ne tient plus sur ses jambes, la pauvre bête !

— Allons, il est une heure passée. Voilà vingt francs, ils sont à vous, si vous y êtes dans une demi-heure, dit Lacenaire en faisant briller un louis devant les yeux clignotants du cocher.

Pour toute réponse, celui-ci secoua son carrick, rassembla ses rênes, fit claquer sa langue et enfila au grand galop la rue Saint-Honoré.

Vingt-cinq minutes après, Lacenaire entrait dans le salon bruyant du restaurateur de la barrière, et était reçu comme un triomphateur par l’assistance enthousiasmée.

— Où est-il ? que je le contemple, le grand homme ! dit ce même clerc qui n’avait pu discourir sur la Pologne, et dont un repos de deux heures n’avait pu calmer ni l’envie de jouer à l’orateur, ni l’exaltation conservatrice ; — où est-il que je le couronne !

Alors, montant sur une chaise près de laquelle l’amphitryon s’était placé, le jeune homme au discours rentré prit une serviette par ses deux bouts et lui imprima un mouvement de rotation ; ensuite faisant faire à la toile éclatante d’une blancheur moirée un mouvement circulaire sur elle-même, il en entoura le front de Lacenaire, en la fixant à ses tempes par un nœud à rosette : puis d’un ton emphatique :

— Pardonnez-moi, sire, de n’avoir à déposer sur votre tête auguste que cette simple couronne, dit le clerc en