Page:Lacenaire, éd. Cochinat, 1857.djvu/87

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sables. Mais il y faisait à peine ses frais, et la moitié d’une semaine s’écoulait parfois sans qu’il vit arriver une pratique. Désespéré de son peu de succès, le commerçant fit banqueroute, mit la clef sous la porte et rentra chez un troisième entrepreneur. Mais, au lieu de rester attaché au même établissement, il devint nomade, chercha sa vie à droite et à gauche, n’allant qu’aux endroits où le travail était pressé. Il devint enfin écrivain ambulant, et par sa faute il lui fallut renoncer encore à cette ressource.

En allant chercher du travail chez l’un et chez l’autre, le copiste-bohème, comptant sur ses forces, avait l’habitude de prendre quelquefois plus de rôles qu’il n’en pouvait confectionner.

Une fois, entre autres, il fut chargé de grossoyer une requête pour un avoué d’appel. Il fallait qu’elle fût livrée à jour fixe, et il se trouva en retard pour la rendre à l’officier ministériel. Il prit alors le parti, pour en finir plus vite, de faire recopier plusieurs fois le même rôle par différentes personnes. Le papier timbré lui ayant été fourni, il ne pouvait le rapporter sans faire découvrir sa coupable négligence ; il le garda donc.

On sut sa ruse une quinzaine de jours après, par hasard. Tous les bureaux d’écritures retentirent de cette prouesse, et il lui fut impossible de s’y représenter, car, après tout, c’était bien réellement un bel et bon abus de confiance qu’il avait commis en agissant ainsi.

Le désordre venait de rejeter Lacenaire dans la détresse, et la misère le talonnait sans pitié : il fut obligé