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L’HOMME DE LA MAISON GRISE

Mme Francœur ; mais M. Ducastel…

— Je vous accompagnerai à l’église, acheva Yvon, en s’adressant aux d’Azur.

— C’est entendu ! fit Luella en souriant.

Le lendemain matin, Yvon attendait ses compagnons dans le salon, et bientôt, tous trois se dirigeaient vers l’église. Au moment d’entrer cependant, le jeune homme leur dit :

— Je vais vous conduire au banc de M. Francœur. Quant à moi, je suis obligé de monter à l’orgue, car je fais partie du chœur de chant.

— Nous nous retrouverons, à la sortie de l’église, après la messe alors, fit, assez naïvement ( ?) Luella.

Yvon se contenta d’incliner la tête, sans répondre à cette… suggestion de la jeune fille.

La messe terminée, les d’Azur ne se pressèrent pas de sortir de leur banc ; ils attendirent que la foule fut moins grande.

Quand, enfin, l’allée fut plus libre, ils se décidèrent de sortir à leur tour. Luella, qui venait la première aperçut, la précédant, mais séparée d’elle par une dizaine de personnes peut-être, une jeune fille à la démarche hésitante. Aussitôt, elle la reconnut, et fronçant les sourcils, elle se dit :

— Vais-je donc trouver sans cesse cette aveugle sur mon chemin dorénavant ?

Ses yeux ne quittaient pas Annette, qu’une femme avait prise sous le bras, la conduisant vers la porte de sortie.

Luella eut bien voulu fendre la foule afin d’arriver, la première, dans le portique de l’église… Pourquoi ?… Elle ne le savait pas, au juste.

Mais Annette était rendue dans le portique, bien avant Luella ; celle-ci la vit… Elle vit autre chose aussi, qui eut le don de remplir son âme de colère, et de haine envers la pauvre aveugle : Yvon attendait la jeune fille… Il tenait en laisse un magnifique collie, et lorsque parut Annette, entraînant le chien à sa suite, il accourut au-devant d’elle puis, tous deux partirent dans la direction du centre de la ville… tout comme si Mlle d’Azur n’eut pas assigné un rendez-vous au jeune homme, il y avait un peu plus d’une heure.

Au dîner, Luella fit contre fortune bon cœur et elle essaya de paraître gaie ; elle parla même avec enthousiasme de leur excursion projetée à la Ville Blanche.

— Vers quelle heure partirons-nous ? demanda Richard d’Azur.

— Pas avant quatre heures, dans tous les cas, décida Luella.

— Quatre heures ; ce sera fort bien, agréa Yvon. Il fera un peu moins chaud et nous serons certains de trouver M. Jacques chez lui… Vous aimerez M. Jacques, Mlle d’Azur, reprit le jeune homme, car il est d’une amabilité, d’une courtoisie charmantes.

— Et Mme Jacques ? questionna Luella.

— Il n’y a pas de Mme Jacques, Mlle d’Azur, répondit Yvon d’une voix qui tremblait malgré lui ; c’est qu’il se disait que, d’après certaines rumeurs, il y aurait une Mme Jacques bientôt… Annette… celle qu’il aimait, lui, Yvon !

— Un bon parti, pour quelque jeune demoiselle ou veuve des alentours alors ! dit en riant Richard une splendide demeure.

— Ainsi, M. Jacques est célibataire ?

— Il est veuf, depuis bien des années, je crois. Il vit seul, avec deux domestiques, au Gîte-Riant, qui est d’Azur.

— Peut-être… murmura Yvon, dont le visage se rembrunit.

— Vous l’estimez beaucoup ce M. Jacques, n’est-ce-pas, M. Ducastel ? demanda Richard d’Azur.

— Beaucoup en effet !… J’ai des raisons pour cela aussi.

À quatre heures précises donc. M et Mlle d’Azur, accompagnés d’Yvon, se dirigeaient vers la Ville Blanche. Tous trois étaient à cheval, et vraiment Luella paraissait bien, vêtue en amazone. Il était évident, en plus, qu’elle avait dû suivre tout un cours d’équitation, car elle montait et conduisait sa monture avec aise et assurance.

Catherine conduisit les visiteurs dans le salon, à leur arrivé au Gîte-Riant, puis elle alla à la recherche de Lionel Jacques.

Le maître de la maison parut bientôt et il fit un accueil fort cor-