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NÉMOVILLE

CHAPITRE XXV.


LE MONT BERNARD.


On était au dix mai. Jeanne, occupée sur la plage à préparer le déjeuner, ne ressemblait plus à la Jeanne que nous avons vue quelques jours auparavant, cachant son inquiétude pour ne pas alarmer son amie et essayant de paraître gaie, lorsqu’elle avait la mort dans l’âme. Jeanne, aujourd’hui, ne peut plus cacher son angoisse, car l’angoisse se lit sur ses traits tirés et dans sa pâleur extrême aussi bien que dans sa nervosité, qu’elle ne sait pas maîtriser. Gaétane vient la rejoindre ; elle aussi porte dans toute sa personne les marques des jours de secrète terreur qu’elle a vécus. Les deux amies semblent redouter de se regarder ; cependant elles échangent un cordial bonjour et se témoignent la même amitié.

Ce matin-là l’appétit fait défaut aussi ; on mange du bout des dents, souvent des regards inquiets se tournent à la dérobée vers la montagne Bernard.