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la recevoir, vous êtes venus ici pour être enseignés.

Lorsque vous étiez enfant, vous aviez une mère, ce fut sur son sein que vous reçûtes votre première éducation. Elle vous éclaira d’abord dans l’ordre des sensations, en vous dirigeant continuellement dans vos rapports avec les objets extérieurs. De plus, par la transmission longue et laborieuse de la parole, elle-ouvrit en vous la source de l’intelligence. Puis elle déposa au fond de votre âme un trésor plus précieux, celui de la conscience ; elle vous punit et vous récompensa selon vos actions, vous donna la mesure du juste et de l’injuste, et fit de vous un être moral. Elle vous initia encore aux mystères de la foi, et vous apprit à croire aux choses invisibles dont les choses visibles ne sont que le reflet ; elle fit de vous un être religieux. C’est ainsi que, dès l’aurore de votre vie, vous fûtes enseigné dans les quatre ordres qui constituent tout votre être : dans l’ordre des sensations, des idées, de la conscience et de la foi.

Quand l’homme a passé l’âge du premier enseignement, il se range dès lors dans une des deux classes qui se partagent l’humanité : les hommes éclairés, et ceux qui ne le sont pas. Les hommes qui ne sont pas éclairés forment ce qu’on appelle le peuple, et le peuple, absorbé dans sa pauvreté et son travail incessant, reste à jamais incapable de revenir sur son éducation première par ses études personnelles et ses réflexions propres. Il ne saurait discuter à fond ses sensations, ses idées, sa conscience,