Page:Lacretelle Silbermann.djvu/106

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qu’elle portait à mon père, et si chaque année elle ne revenait pas à Aiguesbelles avec le cœur d’un enfant qui veut se faire pardonner.

Sous cette tradition austère, si bien revêtue de douceur, le devoir se présentait avec une saveur exquise. Je me plaisais à me fixer gravement de petites tâches secrètes que je m’évertuais à mener à bien. Au crépuscule, à l’heure où les travaux des hommes cessaient dans le mas, j’allais me recueillir dans ma chambre.

Ma chambre était située à l’étage le plus élevé de l’habitation. Les murs étaient blanchis à la chaux et le plancher recouvert de carreaux rouges. Il y avait, accrochée au mur, une image que je regardais souvent. C’était une grande photographie représentant un de mes oncles, un frère aîné de ma mère, qui était mort et que je n’avais jamais connu, mais dont la figure farouche et la destinée énigmatique hantaient mes pensées.