Page:Lacretelle Silbermann.djvu/134

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

aux oreilles le « sauve-moi » de Silbermann, je voulus tenter un dernier effort. Pour apitoyer mon père, je lui représentai la malédiction qui poursuivait Silbermann, son martyre secret, les transes où il vivait actuellement. Je lui avouai combien cet état me touchait ; je lui livrai, espérant l’attendrir, des preuves de ma folle amitié et de mon tourment. C’était la première fois que j’analysais mon cœur, et, grisé par les paroles, je me dénonçais avec une ardeur candide. Dans mon emportement, je poussai ce cri ingénu :

— Ah ! je ne savais pas qu’on pouvait éprouver un tel sentiment pour d’autres que ses parents !

Et dans un geste suprême, je tendis vers mon père des mains suppliantes.

Mon père s’était levé. Ces mains que je tendais, il les avait prises dans les siennes ; il ne les serrait pas fortement mais les retenait aux poignets avec la fausse douceur d’un médecin. J’avais levé