Page:Lacroix - Contes littéraires du bibliophile Jacob à ses petits-enfants, 1897.djvu/196

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mon fils, à celui que j’aime par-dessus tout ! En quel lieu les avez-vous trouvés ? Où donc est-il allé, mon pauvre Paul, après s’être ainsi dévêtu ? Ah ! Monsieur, n’aurait-il point perdu au jeu ses hardes et son trousseau, le méchant garçon ? Retirez-moi d’angoisse, par pitié !


— Révérend père ! répondit Armand, qui riait sous cape, quoi qu’il fît pour tourner ses idées du côté tragique de la situation ; je viens vers vous tristement, pour vous annoncer l’accident le plus funeste, le plus lamentable, le plus imprévu, et pour vous prier de dépenser cent écus, en mémoire de votre infortuné neveu Paul Scarron.



Pierrefuges étalant devant le chanoine les chausses de Paul Scarron.


— Qu’est-ce ? Cent écus ! reprit l’oncle, qui n’eut pas le cœur d’être avare, en présence d’un douloureux événement qu’il appréhendait plus que tout. Paul est-il mort ?


— Hélas ! mon digne seigneur ! repartit l’imposteur, avec un interminable éclat de rire, qui simulait des sanglots étouffés : ce jeune homme, de si noble race, de si fière espérance, de savoir si précoce, d’esprit si mignard, qui avait pour vous si chaude amitié et si profonde reconnaissance… Las ! si vous l’aviez vu en cet état !…


— Bon Dieu, secourez-moi ! s’écria le chanoine, trop préoccupé de sa douleur pour en être distrait par les rires inextinguibles de ce fatal messager. Ô ciel ! qu’est-il advenu ?


— Voici les habits de votre cher neveu, que je vous apporte, messire : ne les reconnaissez-vous pas ? Las ! c’est moi qui l’ai déshabillé, l’héroïque jeune homme, quand les bateliers ont tiré son corps de la rivière…


— Quoi ! mon neveu est noyé ! Mon Paul a rendu l’âme ! interrompit le chanoine, en pleurant comme un