Page:Lacroix - Contes littéraires du bibliophile Jacob à ses petits-enfants, 1897.djvu/218

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pour qu’on songe à nous tirer de notre purgatoire ?


— Le roi est peut-être décédé ? dit mademoiselle d’Urtis, avec douceur. J’en aurais beaucoup de déplaisir, car la mort d’un roi de France me semble de plus haute conséquence que la mort d’un oiseau, et j’ai versé force larmes, quand mon perroquet a été tué par le singe de madame la supérieure…


— Mesdemoiselles, dépêchons ! interrompit Germain, en fermant la portière du carrosse dans lequel il avait fait monter les deux amies : Madame m’a commandé de ne m’arrêter guère dans la ville.


— Il faut que la chose presse ? reprit Antoinette, riant de la grimace mystérieuse du cocher. Sans doute que notre couvert est mis à Saint-Germain et que le roi ne veut pas dîner sans nous ?


— Je suis sûre qu’il y a quelque mort ! murmura Thérèse qui ne put se défendre d’une émotion d’anxiété. J’ai rêvé, cette nuit, que je cueillais des soucis et des immortelles, c’est un méchant pronostic.


— Et moi, j’ai rêvé que je faisais des pelotes de neige, et, en effet, il a neigé toute la nuit durant.


— Vois-tu, Printanière, nous n’allons pas à Saint-Germain. Ce n’est pas la route que prend le carrosse.


— Hé, Germain, mon ami, as-tu la visière nette ou troublée ? demanda mademoiselle de La Garde. Ta raison est-elle restée dans la bouteille ? Tu te trompes de chemin et tu touches tes chevaux en aveugle. Où nous conduis-tu ?


— À La Garde, Mademoiselle, sauf votre respect, comme l’ordonne Madame.