Page:Lacroix - Contes littéraires du bibliophile Jacob à ses petits-enfants, 1897.djvu/291

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pour obtenir, de Monsieur, son intervention auprès du roi.


— Êtes-vous certain, Monsieur le comte, demanda-t-elle, que Bussy ne soit pas l’auteur de cette vilaine chanson contre Madame ?


— J’en jurerais, par la raison que si Bussy l’avait faite, il s’en vanterait, au lieu de s’en défendre ; son seul crime, c’est de l’avoir chantée, dans une débauche où il n’avait pas la tête trop saine. Madame ne lui en gardait pas grande rancune, mais Monsieur en a été gravement offensé et s’en est plaint au roi.


— Si mes enfants étaient ici, dit en soupirant madame de Sévigné, je ne me refuserais pas à faire une tentative auprès de Monsieur, bien que Monsieur me connaisse à peine de nom, car il n’avait pas plus de onze ans, lorsque j’ai quitté la cour, à la mort de mon mari.


— Monsieur vous connaît bien, Madame la marquise, repartit M. de Saint-Aignan, Monsieur vous admire entre toutes les femmes, et c’est lui qui m’a chargé secrètement de tout faire au monde, pour vous rendre à la cour qui vous avait perdue depuis plus de douze ans. Il lit, il copie de sa main toutes les lettres que vous écrivez à vos amis et qui circulent ici de main en main, dès qu’on les a reçues. Monsieur en est le plus curieux collecteur, et ces jours derniers, il déclarait tout haut, devant le roi, qu’une femme qui écrit de pareilles lettres, est au-dessus de toutes les princesses et de toutes les reines de la terre.


— Pensez-vous que Madame soit de son avis ? répliqua-t-elle malignement, flattée d’un tel éloge, qui lui venait de la part du premier prince du sang de France. Ô