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Page:Lacroix - Journal d'un habitant de Nancy, 1873.pdf/151

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mardi 30 août. — 1870.

mais comme on sait que j’ai du crédit, et que, sous tous les régimes, on s’empresse autour des gens en faveur, je me vois accablé de sollicitations et de demandes. Aussi je m’enfuis à la campagne pour échapper à ces obsessions et à l’inconvénient plus grave de passer pour ami des Prussiens. Voilà pourquoi je viens chercher ici un sauf-conduit. » —

Cependant les hôtes étrangers continuent à m’arriver sans interruption, mais toujours sans que j’aie à me plaindre d’aucun d’eux. L’individu qui se présente aujourd’hui, un billet de logement à la main, est un chef de train wurtembergeois que son service retient à la gare, et qui trouve mon domicile trop loin pour s’y installer. D’ailleurs il ne m’est assigné que pour un jour, et il se contente, ni plus ni moins qu’un soldat, des trois francs que je lui lâche, pour m’en débarrasser.

Tout le monde n’en est pas quitte à si bon marché. L’aventure de notre ami, M. Vagner, en est la preuve. Elle peut en outre servir de supplément à l’article Du pour et du contre sur les Prussiens, en montrant ce qu’on a à redouter de leurs violences individuelles, et ce qu’on peut attendre de la discipline qui règne dans leurs armées.

Hier donc, pendant l’absence de Vagner, sa maison est envahie par dix soldats conduisant quatorze chevaux qu’ils installent aussitôt dans son écurie et