Page:Lacroix - La Perle de Candelair.djvu/131

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
123
L’ONCLE ISIDORE

sait-elle pas que le reste allait se détacher de la montagne et l’écraser.

La frayeur ne raisonne pas ; elle agit.

Mme Malsauge courut éperdue jusqu’à ce qu’elle fût plus loin de ce dais superbe, qui ne songeait pas le moins du monde à changer de position. Elle s’arrêta pourtant, tourna les yeux vers le roc tranquille, et, quelque peu honteuse, revint vers son parent, qui, tâchant de la rassurer, la suivait, mais de loin, n’ayant plus, depuis longues années, ses jambes de quinze ans.

Ce petit incident s’était passé en bien moins de temps qu’il ne nous en faut pour le raconter. Mme Hélène était encore toute tremblante, lorsqu’à quelques pas de cette chose noire tombée tout à l’heure si malencontreusement, elle vit un homme franchir le chemin, après avoir descendu, comme une pierre détachée de la cime, la pente effrayante de la montagne.

— N’ayez donc pas peur, Hélène, dit enfin le vieux monsieur, qui venait d’être rejoint par la jeune femme, ce n’est qu’un chien qui aura perdu pied par là-haut, et sera venu se tuer fort sottement devant vous.

— Dans le seul but de m’effrayer, n’en doutez pas, ajouta la jeune femme en souriant.

À ce moment, Étienne, par un dernier élan, arrivait à la hauteur du Pitiou et courait jusqu’au chien qui, brisé par sa chute, restait étendu sur le chemin.

Mme Hélène ne souriait plus. Elle avait eu le cœur brisé par une anxiété terrible ; car, à force de s’occuper du jeune homme, elle s’était attachée à lui par cette espèce d’intérêt qui nous lie aux gens dont notre esprit est inquiet.