Page:Lafargue - Pamphlets socialistes, 1900.djvu/127

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les plaisirs et l’inutilité, si l’avenir est si incertain, si menaçant, si le vent le plus léger qui souffle à la Bourse renverse les fortunes les mieux assises, si rien n’est stable, si le riche du jour sera le ruiné du lendemain ?


Les hommes te maudiront, Dieu-Capital, en contemplant mon abaissement ; ils nieront ta puissance en calculant la hauteur de ma chute, ils repousseront tes faveurs.


Pour ta gloire, replace-moi en ma position perdue, relève-moi de mon abjection, car mon cœur se gonfle de fiel, et des paroles de haine et des imprécations se pressent sur mes lèvres.


Dieu farouche, Dieu aveugle, Dieu stupide, prends garde que les riches n’ouvrent enfin les yeux et ne s’aperçoivent qu’ils marchent insouciants et inconscients sur les bords d’un précipice ; tremble qu’ils ne t’y jettent pour le combler, qu’ils ne se joignent aux communistes pour te supprimer !


Mais quel blasphème ai-je proféré


Dieu puissant, pardonne-moi ces paroles imprudentes et impies.


Tu es le maître, qui distribue les biens sans qu’on les mérite et qui les reprend sans qu’on les démérite, tu agis selon ton bon plaisir, tu sais ce que tu fais.


Tu m’écrases pour mon bien, tu m’éprouves dans mon intérêt.


O Dieu doux et aimable, rends-moi tes faveurs : tu es la justice et, si tu me frappes, j’ai dû commettre quelque faute ignorée.


O Seigneur, si tu me redonnais la richesse, je fais vœu de suivre plus rigoureusement ta loi. J’exploiterais