Page:Lafargue - Pamphlets socialistes, 1900.djvu/163

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

jaune ? Maudite mode ! ma barbe et mes cheveux perdent leur originalité ; j’ai envie de me teindre en noir. Qu’en pensez-vous, reines de mon cœur ?

—Doux Jésus ; toi notre idéal, te teindre serait peindre le lis ! s’écria en cœur la troupe amoureuse.

—Prunelles de mes yeux, votre désir est ma loi.

—Seigneur, votre Église est attaquée.

—Les femmes s’enfarinent-elles de poudre de riz ? Pouah ! On croirait embrasser des sacs de meunier. J’ai défendu la poudre et le rouge à toutes celles qui m’ont consacré leur pomme-grenade. Si les hommes agissaient ainsi…

—Seigneur, vos temples sont profanés !…

—Rachel, l’émailleuse, a-t-elle inventé un nouveau parfum pour enivrer l’âme et réveiller les forces épuisées par l’amour ?

—Seigneur, vos fidèles sont dans la désolation. Ils ne pleurent plus ; ils ont pleuré toutes les larmes de leurs yeux ; ils ne se lamentent plus, la main des impies a scellé leurs lèvres. Seigneur, vous êtes chassé de vos palais, et votre représentant sur la terre dort sur la paille d’une prison.

—Ça doit être mal commode. Mais sont-ce là les nouvelles que tu nous apportes de la demeure des vivants ? Ah ça ! qui donc es-tu pour prendre tant d’intérêt à mon Église ?

—Seigneur, je suis Pie IX.

—Ah ! ah ! ah ! Et la troupe folichonne de s’esclaffer.

—Ce pauvre vieux, le représentant de notre Jésus bien-aimé, dont les baisers sont si doux, dont les caresses