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passions et caractères.

dans le choix et la présentation de ses types, à mesure que le roi l’y encourage. Voici bientôt, dans les Fâcheux, toute une bande de seigneurs authentiques, qui défile, bourdonnante et agitée. Rien que des étourneaux ou maniaques, très importuns pour ceux qui n’ont pas le temps de les entendre, mais d’un égoïsme banal, superficiel et inoffensif. C’est l’amateur de théâtre, bruyant et vantard, qui encombre la scène et juge à tort et à travers, c’est l’amateur de musique, compositeur de ballets, qui assomme les gens de ses ariettes, le duelliste enragé, toujours en quête d’un second, le joueur de piquet, qui raconte ses coups manques, l’amant sentimental qui vous vient poser des questions d’amour, le chasseur forcené dont les interminables récits ont la longueur et la solennité des tirades épiques.

Le salon littéraire de la Critique assemble enfin de vraies femmes du monde, l’une, la maîtresse de la maison, Uranie, indulgente et douce, l’autre, sa cousine Élise, plus maligne et ironique, toutes deux intelligentes et charmantes, vis-à-vis de la prude et dédaigneuse Climène « la plus grande façonnière du monde…, ce qu’on appelle précieuse, à prendre le mot dans sa plus mauvaise signification ». L’aristocratie masculine est aussi représentée, dans ce cénacle, en partie double. Le détracteur de l’École des Femmes, maladroit et prétentieux, est un de ces marquis, décidément voués au ridicule, un de ces messieurs du bel air qui ne veulent pas que le parterre ait du sens commun et qui seraient fâchés d’avoir ri avec lui. Son défenseur est le judicieux et fin chevalier Dorante, qui défend avec feu, pied à