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pensée et morale.

de toute sorte entre les idées et les faits, les principes et les actions, le bien et le mal qu’ils sont obligés d’y constater à chaque instant. Ils paraissent, le plus souvent, se contenter d’en rire ou d’un sourire. Mais néanmoins, chez eux, l’instinct de solidarité humaine et le besoin de secourir ses semblables dans les communes misères, est plus fort que leur dédain, leur dilettantisme et leur raillerie. C’est alors qu’éclate, violemment ou discrètement, leur amour pour la Nature et leur passion pour la Vérité, mais avec une libre simplicité et des prudences d’affirmation qui ne font encore prévoir ni les sophismes orgueilleux de Jean-Jacques, ni le cynisme matérialiste de quelques encyclopédistes.

Dès ses premières œuvres, Molière affirme à la fois, avec sa résolution de donner aux caractères humains la prédominance sur l’intérêt romanesque, une tendance à intercaler, dans le dialogue comique ou sentimental, des observations morales d’une portée générale. Bientôt, cela deviendra une habitude et, dans les grandes comédies, les actes se joindront aux paroles, pour faire sortir de l’ensemble, par les rapprochements ou les antagonismes des caractères, sinon par le dénouement final, une forte impression de sympathie pour les personnages sensés et honnêtes, fussent-ils, d’ailleurs, justiciables de la satire par d’autres côtés, et de pitié, mépris, répulsion, dégoût pour les imbéciles vaniteux et poltrons, les intrigants, fourbes et vicieux. Sa volonté, à ce sujet, fut si bien connue dans son entourage, que d’après Lagrange, il aurait, volontairement, anéanti quelques ouvrages de jeunesse,