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pensée et morale.

librement choisis par sympathie d’abord, et par raison ensuite. Tout lien qui se noue en dehors de ces conditions, par des entraînements irréfléchis ou par des motifs d’intérêt et d’égoïsme, avec de trop grandes différences d’âge, d’humeur, d’éducation, de situation, devient une chaîne pesante, une cause fatale de douleurs tragiques ou de tracas comiques pour les forçats accouplés, et de désordre, par eux et autour d’eux, dans la famille et la société. D’ailleurs, nulle idée qu’il puisse y avoir, hors du mariage, un bonheur durable, nulle prétention de soustraire même des époux mal assortis par leur faute à l’accomplissement de leurs devoirs et au sentiment de leurs responsabilités.

Dans cette lugubre farce de Georges Dandin, si la fille effrontée des Sotenville prétend s’émanciper, elle en doit invoquer pour raison la contrainte qu’ont employée ses parents pour la forcer à sa mésalliance :

GEORGES DANDIN.

C’est ainsi que vous satisfaites aux engagements de la foi que vous m’avez publiquement donnée ?

ANGÉLIQUE.

Moi ? Je ne vous l’ai pas donnée de bon cœur et vous me l’avez arrachée. M’avez-vous, avant le mariage, demandé mon consentement, et si je voulais bien de vous ? Vous n’ayez pour cela consulté que mon père et ma mère ; ce sont eux, proprement, qui vous ont épousé….

Quant au pauvre mari, bafoué, humilié, dès le commencement de la crise, il ne perd jamais conscience de ses fautes, et n’accuse, avec raison, dans sa détresse, que lui-même :