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le style.

composition à haute voix, familière aux vrais poètes, mais plus naturelle encore chez un auteur-acteur dont l’idéal de style doit être le style scénique.

Restent contre lui les accusations de jargonner, d’employer des termes bas ou proscrits, des locutions insolites ou surannées, d’estropier les mots courants ou d’en forger de nouveaux. Le fait est que si l’on parcourt les lexiques de Génin et de Livet, on constate que son vocabulaire et ses façons d’en user diffèrent singulièrement des usages adoptés par les écrivains puristes depuis Vaugelas. Pour les termes, il puise à pleines mains dans nos vieux conteurs, dans Rabelais, Montaigne, Amyot, mais surtout dans la langue vivante, la langue familière, sonore, franche, hardie, sans périphrases, des gens du peuple et des paysans, aussi bien que dans celle des gens de lettres et des gens du monde, prédécesseurs ou contemporains, ronsardisants attardés ou malherbistes gourmés, réalistes ou stylistes, burlesques ou précieux. Il garde à cet égard la liberté de Régnier, Théophile, Scarron, Rotrou. Tout dépend, pour lui, des occasions, de l’origine, du caractère, de l’éducation de ses personnages, du milieu dans lequel ils se meuvent.

Et si les mots en cours ne lui suffisent pas, ne lui semblent pas assez expressifs, frappants, colorés, il ne se gêne point, pas plus que les bonnes gens, pour lancer quelque augmentatif, diminutif ou néologisme de circonstance. Sur la vitalité et le mouvement de la langue nationale, il conserve les idées progressives de Rabelais. Du Bellay, Ronsard, vis-à-vis des théories de l’immobilité classique. Qu’importe si bon