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MOLIÈRE.

Hypocondre, mettant Molière en scène, lui fera dire :

J’affiche, je harangue et fais tout de mon mieux,
Mais inutilement je tentai la fortune.
Après Héraclius on siffla Rodogune…
….Dans ce sensible affront, ne sachant où m’en prendre
Je me vis mille fois sur le point de me pendre..
…Où je devais périr, je rencontrai le port.
Je veux dire qu’au lieu des princes de Corneille,
Je jouai l’Étourdi, qui fut une merveille,
Car à peine on m’eut vu, la hallebarde au poing,
À peine on eut ouï mon plaisant baragouin,
Vu mon habit, ma toque, et ma barbe et ma fraise,
Que tous les spectateurs furent transportés d’aise…

Le roi, sur ces entrefaites, était rentré à Paris. Le Maréchal de la Meilleraye lui offrit une petite fête à son château de Chilly, le 28 avril. Molière, appelé, pour sa seconde rencontre avec le souverain, lui donne l’étrenne du Dépit amoureux. Quelques jours après, on demande au Louvre l’Étourdi, déjà applaudi au Petit-Bourbon. Comme les bourgeois et vilains de Paris, la noble assistance, mise en joie, réclame encore, réclame surtout d’autres farces. Le Médecin volant, Gros-René écolier (l’une retrouvée dans les papiers de Jean-Baptiste Rousseau, l’autre, en cinq actes, perdue), le Dépit amoureux, préparent la cour et la ville à l’éclat d’une prochaine escarmouche autrement hardie.

Le 18 novembre 1659, la Farce des Précieuses, déjà connue aussi dans le Midi, apparut sur la scène parisienne avec Cinna. Le succès fut aussi rapide qu’imprévu. Les acteurs, contre l’usage, n’avaient même osé doubler les prix pour la première représentation. On dut le faire dès la seconde, et l’on put