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LES PREMIÈRES BATAILLES.

le faire pendant longtemps. Cette première attaque contre le pédantisme et le maniérisme dont la littérature était empoisonnée depuis près d’un demisiècle, répondait trop à l’état général des esprits, après les folles équipées de la Fronde, pour n’être pas saluée, comme un bon présage, par la génération nouvelle. Après les régences agitées de Marie de Médicis et d’Anne d’Autriche, les luttes de Richelieu et Mazarin contre l’anarchie et l’insolence nobiliaires, l’écrasement de la littérature indépendante et populaire par le formalisme des grammairiens, la préciosité des salons, la sentimentalité factice des pastorales, l’emphase et la grossièreté des imbroglios tragi-comiques, c’était dans toute la nation, surtout à Paris, un besoin irrésistible d’ordre et de paix, de bon sens, de vérité, de raison et de gaieté, dans les plaisirs comme dans la vie. Descartes, par le Discours de la Méthode (1637) et le Traité des Passions (1649), avait puissamment orienté dans ce sens les esprits réfléchis. Pascal, par les Provinciales (1656-1657), venait de déclarer la guerre à toutes les hypocrisies et à tous les mensonges. Tous les espoirs se tournaient vers le jeune roi, qu’on sentait viril, impatient de briser les freins imposés à ses appétits de gloire et de popularité par les prétentions des courtisans et les chicanes des parlementaires.

Lorsque furent données les Précieuses, le roi et son frère étaient dans les Pyrénées. Si le premier jour ce fut la victoire, ce fut aussi le scandale. Tout l’Hôtel de Rambouillet était là ! Cette grosse pierre lancée brusquement dans le tranquille étang des