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LES PREMIÈRES BATAILLES.

Du Saule qui lui tend les bras.
…La branche amoureuse et fleurie
Dans cinq ou six jours se promet
De l’attirer à son sommet.

« Vous montrerez ces beaux vers à Mlle Menou seulement ; aussi bien sont-ils la figure d’elle et de vous ».

Quatre mois après son mariage, Mlle Molière (le titre de Madame était réservé aux femmes de qualité) entrait dans la troupe avec une part de sociétaire, réservée, d’ailleurs, pour elle depuis un an. Toutefois, elle ne devait débuter que l’année suivante, après son premier accouchement. En attendant, durant la lune de miel, le poète laborieux n’avait point perdu son temps. Sous l’action d’une idée fixe, celle d’être heureux dans son ménage, de l’être par sa tendresse et son indulgence, il avait repris l’École des Maris pour en faire l’École des Femmes. En fait, c’est la même thèse, avec mêmes contrastes dans les caractères et les sentiments, aboutissant aux mêmes conclusions, mais avec une force d’analyse et de pensée toujours grandissante, une verve de plus en plus abondante et communicative, une perfection plus soutenue de style théâtral, vif, clair, souple, coloré, vibrant dans l’amertume comme dans la gaîté.

À l’heure où l’on commençait à l’accuser de s’endormir dans les félicités ou de se laisser accabler par les désillusions du mariage, il reparaissait donc sur la scène, le 26 décembre 1662, plus militant que jamais. Amis et ennemis, ce jour-là, purent se compter, se mesurer, aiguiser leurs armes, On n’avait jamais vu tant de visages souriants, ni tant de mines décon-