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MOLIÈRE.

fites, ni tel triomphe, ni tel tumulte. L’École des Femmes, sans désemparer, allait tenir chaque soir, de Noël jusqu’à Pâques, l’affiche du Palais-Royal et, presque tous les autres jours, se transporter en ville. Mais à travers quelles protestations, quels orages, quels échanges violents de paroles et d’écritures !

Les attaques par le livre ou le théâtre ne pouvaient alors se produire aussi vite qu’aujourd’hui, à cause des lenteurs et difficultés du permis d’imprimer ou déjouer. Tandis que les adversaires jasaient, complotaient, griffonnaient dans l’ombre, les amis n’hésitèrent pas à se déclarer. Quatre jours après la première représentation, le jeune Boileau, connu seulement, dans le petit cénacle, par quelques satires non imprimées, envoyait son salut de nouvel an « à M. Molière » :

Ta muse avec utilité
Dit plaisamment la vérité,
Chacun profite à ton école ;
Tout en est beau, tout en est bon,
Et ta plus burlesque parole
Vaut souvent un docte sermon.

Nature, Vérité, Moralité, voilà décidément ce que réclament, avec les précurseurs, La Fontaine, Sorel, Furetière, Chapelle, les nouveaux combattants, Boileau et Racine. C’est le temps où les réunions de ces Jeunes-France, soit au cabaret, soit chez Boileau, rue du Vieux-Colombier, furent les plus fréquentes, cordiales et fécondes pour l’avenir.

Boileau terminait ses stances par le conseil de laisser « gronder les envieux ». Ils allaient gronder,