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la grande lutte.

leurs étrennes de 1668, on crut trouver, dans cette étincelante et victorieuse rivalité avec Plaute et Rotrou, plus d’une allusion transparente aux dernières misères et consolations du poète de cour, serviteur des puissants :

Vers la retraite en vain la raison nous appelle.
En vain notre dépit quelquefois y consent :
Leur vue a sur notre zèle
Un ascendant trop puissant,
Et la moindre faveur d’un coup d’œil caressant
Nous rengage de plus belle.

La liberté, parfois irrévérencieuse, vis-à-vis des grands et de leurs vices, qui éclate, à chaque instant, dans les vers, au rythme libre, de cette spirituelle fantaisie, prouvait bien clairement et publiquement la rentrée du poète en des grâces qu’il n’avait jamais sérieusement perdues. Remis entrain par le succès, complétant ou recomposant, avec une sûreté rapide de mise au point due à son expérience plus mûre, d’anciens scénarios, il s’affirme, coup sur coup, avec une profondeur d’ironie douloureuse, artiste plus vivant que jamais, dans ces deux comédies, poignantes et presque tragiques, Georges Dandin, en juillet, l’Avare en septembre.

À travers tous ces événements, sa pensée, comme celle de ses amis, restait toujours attachée à Tartuffe. Durant l’année 1668, comme Chantilly, hors du diocèse de Paris, échappait aux foudres de l’excommunication lancées par Mgr de Harlay, le Grand Condé y avait fait représenter publiquement le Tartuffe, le 20 septembre. Il s’était déjà donné, clandestinement, la même satisfaction, dans son