Page:Laforgue - Œuvres complètes, t1, 1922.djvu/70

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Minuit un quart ; quels bords te voient passer, aux nuits
Anonymes, ô Nébuleuse-Mère ? Et puis,
Qu’il doit agoniser d’étoiles éprouvées,
À cette heure où Christ naît, sans feu pour leurs couvées,
Mais clamant : ô mon Dieu ! tant que, vers leur ciel mort,
Une flèche de cathédrale pointe encor
Des polaires surplis ! — Ces Terres se sont tues,
Et la création fonctionne têtue !
Sans issue, elle est Tout ; et nulle autre, elle est Tout.
X en soi ? Soif à trucs ! Songe d’une nuit d’août ?
Sans le mot, nous serons revannés, ô ma Terre !
Puis tes sœurs. Et nunc et semper, Amen. Se taire.

Je veux parler au Temps ! criais-je. Oh ! quelque engrais
Anonyme ! Moi ! mon Sacré-Cœur ! — J’espérais
Qu’à ma mort, tout frémirait, du cèdre à l’hysope ;
Que ce Temps, déraillant, tomberait en syncope,
Que, pour venir jeter sur mes lèvres des fleurs,
Les Soleils très navrés détraqueraient leurs chœurs ;
Qu’un soir, du moins, mon Cri me jaillissant des moelles,
On verrait, mon Dieu, des signaux dans les étoiles ?

Puis, fou devant ce ciel qui toujours nous bouda,
Je rêvais de prêcher la fin, nom d’un Bouddha !