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ŒUVRES DE JULES LAFORGUE

étude de la Revue des Deux Mondes à la Reine. Ma voix était très assurée. J’ai eu assez de présence d’esprit pour sauter, sans que nul ne s’en aperçût (il y avait là des messieurs et des jeunes filles, feuilletant des albums, brodant) un passage scabreux que je prévoyais, et par cela même à jamais mémorable. (Vous le trouverez au numéro du 15 novembre, page 332)[1]. — Le plus fort est fait.

Ma voix n’a pas tremblé. D’où cela vient-il ? — Pourtant, rappelez-vous que j’ai failli tomber dans votre bureau quand Madame C… m’a parlé !

Je voudrais vous écrire tout en détail, cher Monsieur Ephrussi, mais j’ai tant de lettres à écrire !

La politesse exigeait que je vous écrivisse cette lettre, vous à qui je dois tant, vous par qui je suis ici, vous si bon, si délicatement bon.

Dites-moi cependant que sans être indiscret je puis vous écrire encore d’autres lettres, quand même vous n’y devriez pas répondre.

Je vous vois à votre bureau, au milieu de votre

  1. Il s’agissait, dans une étude sur Mazeppa, l’histoire et la légende, par le vicomte Melchior de Vogüé, d’un passage où l’auteur fait allusion, le plus discrètement du monde, à la passion de Mazeppa pour la femme de Falbovsky, sentiment qui fut la cause du malheur célèbre de Mazeppa. La lecture de ce passage en dit long sur la pruderie qui régnait à la cour de l’impératrice Augusta, ou sur l’idée que Laforgue s’en faisait.