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Page:Laforgue - Œuvres complètes, t6, 1930.djvu/216

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ŒUVRES COMPLÈTES DE JULES LAFORGUE

queue qu’il avait trouvé installé là en arrivant, selon la gracieuse attention à laquelle sont habitués les Saint-Saëns et les Rubinstein, quand ils descendent à Berlin. Sur ce piano, se trouvaient éparpillés des programmes et des billets de son concert de demain.

Un garçon entra, déposa le lourd bol de café, les œufs, le pain, le beurre, — et une lettre ; puis se mit à faire du feu dans le classique calorifère de faïence blanche.

    avec leurs murs que n’a jamais souillés la gaieté bariolée d’une affiche.

    Sous les Tilleuls, — entre deux files de casernes couleur poussière, sans toits, mais à terrasses plates :

    Officiers à monocles et moustaches blondes, — ouvriers en redingotes sales.

    Et les fiacres de deuxième classe à caisson rouge et roues vertes, cheval pas plus étrillé que la barbe de moujik du cocher.

    Presque jamais d’enseignes en lettres dorées, mais noir sur blanc des couleurs de la Prusse.

    Des sergents de ville à cheval, casques, la jugulaire au menton.

    Cafés sans la gaieté des terrasses débordant sur le trottoir.

    Connaissait Berlin, alla revoir de vieilles connaissances : la petite affiche en vers de… celle-ci commençait par un épigramme contre Thibaudin et finissait par recommander des paletots.

    Se munit de tabacs.

    Le camion plein de cercueils.

    La Sing Akademic, petit temple grec dans des arbres entre le Corps de garde, l’Université et l’Arsenal.

    Les dames en cheveux, — bancs, — chapelle protestante.

    Habitués des Linden : le prince Radziwill, aide de camp, qui revient du palais, le duc de Sagon à la mode de 1830.

    Le remettre au courant de la vie berlinoise par un coup d’œil au magasin de photos.

    Bébés en hussard.