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Page:Laforgue - Œuvres complètes, t6, 1930.djvu/217

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UNE VENGEANCE À BERLIN

Une lettre sur papier rose vergé, timbrée de Berlin même ! Jean l’ouvrit avec un vague sourire de fatuité, qui s’acheva en une moue perplexe. Cette lettre disait en bon français :

« Monsieur le pianiste de Paris,

« Je me vois dans la triste nécessité d’avoir une entrevue avec vous avant votre concert.

« Vous aurez bien l’amabilité de vous trouver, entre deux et trois heures, dans la pâtisserie À la Couronne, au coin de l’avenue des Tilleuls et de l’avenue Frédéric. Je serai en noir, j’aurai une tulipe au corsage, et, surtout, j’aurai un éventail. Ayez, je vous prie, un Figaro à la main, bien que je vous connaisse parfaitement.

« Très sérieux, Monsieur !

« Recevez, je vous prie, Monsieur le pianiste de Paris, l’assurance de mon estime artistique.

« Bertha de Tackt
« Pianiste de Son Altesse la Grande-Duchesse de Mecklenstein, chez Villeroy et Stieffel, marchands de musique, 15, avenue des Tilleuls. »

Voilà qui sera peut-être amusant, se dit Jean, bien que mon inconnue soit pianiste de cour