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Page:Laforgue - Œuvres complètes, t6, 1930.djvu/50

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ŒUVRES COMPLÈTES DE JULES LAFORGUE

puis, aux entr’actes, traînant leur grand sabre vers les écuries, le long des courbettes du personnel du cirque.

Rue Frédéric, au crépuscule, à peine : — deux soldats sont arrêtés à causer avec une bonne (imaginez cela rue Richelieu). Un officier arrive. D’un mouvement, la bonne passe au second plan, les deux soldats s’alignent et saluent l’officier en le suivant fixement de l’œil.

Cette façon, en saluant, d’aller rencontrer le regard de l’officier, quatre pas avant qu’il soit là, et de le fixer et de le suivre avec la même intensité de regard, quatre pas durant, après qu’il vous a dépassé, est parfois d’un grotesque irrésistible. Non moins comiques, le dimanche, se promenant sous les Tilleuls, les jeunes « cadets » de dix, douze ans, se rencontrant et se saluant raides.

La tenue militaire a, à Berlin, la plus grande part d’influence sur celle des élégants ou des jeunes bourgeois qui se tiennent. J’en donnerai plus loin des détails. Le premier trait en est naturellement le premier de la tenue du soldat : la raideur, le pas mesuré, et très souvent, plus que très souvent, la manie de faire sonner les talons. Tout le monde, à Berlin, a, malgré toutes