Page:Laforgue - Moralités légendaires.djvu/59

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Silence et lune... Cimetière et nature… Hamlet ! Hamlet ! appelle bientôt la grelottante voix de Kate ; Hamlet !...

La lune inonde tout d’un silence polaire.

Kate se décide à venir voir.

Elle voit. Elle palpe ce cadavre livide de lune et de décès.

— Il s’est poignardé, ô Ciel !

Elle se penche sur cette tombe et lit :


OPHÉLIE
FILLE DE LORD POLONIUS ET DE LADY ANNE
MORTE À DIX-HUIT ANS


Et la date d’aujourd’hui.

— C’était celle qu’il aimait ! Alors, pourquoi m’emmenait-il avec amour ? Pauvre héros... Que faire ?

Elle se penche, l’embrasse, l’appelle.

— Hamlet, my little Hamlet !

Mais la mort est la mort, c’est connu depuis la vie.

— Je vais retournerau Château avec les chevaux, retrouver l’écuyer témoin de notre départ, et je dirai tout.

Elle repart au même trot, tournant le dos à la pleine lune qui devait faire si bien, là-bas, sur les plaines, les plaines, vers Paris et les brillants Valois, tenant cour plénière.

On sut tout, le répréhensible coup du drame à personnalités, l’enlèvement, etc. On envoya chercher le cadavre avec des flambeaux de première qualité. — Ô soir historique, après tout !

Or, Kate était la maîtresse de William.