Page:Lagrange - Œuvres (1867) vol. 1.djvu/102

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
42
RECHERCHES SUR LA NATURE

pas surprenant que ces deux Auteurs soient arrivés à la même formule pour la vitesse du son, et l’accord apparent de leurs calculs ne peut être apporté comme une preuve des fondements de la théorie qu’on vient d’exposer[1].

À l’égard des premières propositions sur la formation des libres élastiques, et surtout de leur comparaison avec les ondes, je crois inutile de m’arrêter davantage à les examiner. Car, outre que plusieurs Auteurs en ont déjà fait voir le peu de solidité et l’insuffisance même pour l’explication des phénomènes du son[2], la manière avec laquelle elles sont présentées dans les Principes fait voir évidemment que l’Auteur ne les adoptait que comme de simples hypothèses pour simplifier la nature d’un problème assez composé de lui-même. Et quand même ces hypothèses seraient vraies, ne serait-on pas en droit d’en exiger une démonstration ? Or cette démonstration doit nécessairement dépendre de la résolution

  1. M. Bernoulli prouve à la vérité, dans l’ouvrage cité, que tout corps qui est tenu en équilibre par deux puissances égales et directement contraires, s’il vient à être tant soit peu déplacé, doit faire autour de son point de repos des oscillations simples et régulières. Mais cette théorie n’est guère applicable qu’au seul cas où il n’y ait qu’un corps mobile. Pour le faire sentir, supposons d’abord, selon cet Auteur, que le corps soit sollicité selon deux directions contraires par les forces égales et il est clair que ces forces ne pourront être que des fonctions de la distance du corps à un point fixe quelconque ; donc, si on lui fait parcourir un espace infiniment petit la somme des accroissements de ces deux forces sera exprimée par ce qui donnera par conséquent la force accélératrice qui porte le corps vers son point d’équilibre ; et comme on ne veut considérer que les mouvements infiniment petits, on supposera constant, d’où la force donnée deviendra proportionnelle à la distance à parcourir et les oscillations se feront selon les lois connues de l’isochronisme. Mais il n’en sera pas de même s’il y a plusieurs corps qui se soutiennent mutuellement en équilibre, quoique rangés tous sur la même droite. Dans ce cas les forces qui agissent sur chacun d’eux seront des fonctions de leurs distances intermédiaires ; ainsi, représentant les déplacements infiniment petits de tous les corps, on aura pour les forces accélératrices des expressions de cette forme peuvent être regardées comme constantes. D’où il est aisé de comprendre que les mouvements des corps ne seront plus astreints au simple isochronisme ; et c’est proprement ce qui arrive aux particules des fibres élastiques de l’air. C’est aussi par cette raison que le calcul qu’on trouve dans le Commentaire des Principes serait encore insuffisant, même quand il ne renfermerait pas des approximations, puisqu’on n’y considère que trois ou quatre particules mobiles. M. d’Alembert a fait sentir cette difficulté pour le cas d’une corde vibrante chargée de plusieurs petits poids, p. 359 des Mémoires de l’Académie de Berlin, pour l’année 1750.
  2. Voyez la suite de l’article des fluides cité ci-dessus ; voyez encore le Mémoire de M. de Mairan dans les Mémoires de l’Académie de Paris, année 1737 ; la Physique de Perrault, et d’autres.