peut-être, non dans l’espoir de mieux rencontrer, mais afin de parcourir les figures baroques qui couvraient les pages de quelques-uns de ces bouquins, et qui piquaient sa curiosité sans la satisfaire, il tomba sur un petit volume écrit à la main et dans la langue qui lui était familière. Quel ne fut pas son étonnement lorsqu’il lut en tête d’un chapitre les mots suivants : — Comment on peut voir et faire des choses surnaturelles… ; et plus loin : — Comment on parvient à faire de l’or. — Par quel moyen on peut ouvrir les portes les mieux fermées. — Comment on peut se changer en toutes sortes de bêtes, etc., etc.
Malgré le rapide essor qu’avait pris son imagination, à l’annonce de toutes ces merveilles, un titre, entre tous, frappa pour le moment son esprit et captiva toute son attention ; ce fut celui-ci : Comment on peut connaître ce qui se passe à une grande distance.
Ces paroles lui rappelant tout à coup sa famille, il voulut, en se conformant aux prescriptions du petit livre, savoir à l’instant même ce qu’elle devenait, et il le sut :
Il vit son pauvre père creusant tristement un sabot, tandis que sa bonne mère tricotait en pleurant dans un coin… Chose incroyable ! il put lire dans leur pensée aussi clairement que dans la sienne, et se convaincre qu’ils étaient tous les deux désolés de son absence.
— Chers amis, s’écria-t-il, en essuyant une larme, nous nous réunirons bientôt !
Alors l’idée lui vint de s’enquérir de son maître, d’apprendre enfin qui il était, où il se trouvait en cet instant, ce qu’il faisait. — Mais ce désir était à peine formé, que Jean le Chanceux, l’œil fixe et les traits bouleversés, jeta un grand cri et perdit entièrement connaissance. Lorsqu’il revint à lui, tout son corps tremblait comme la feuille, et aussitôt qu’il put proférer une parole, il s’écria d’une voix étranglée : — « Le Diable ! le Diable !… Je suis chez le Diable !!… »