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Nous nous engageâmes sur la route, pendant que les villégiateurs, venus à la rencontre du train, s’en retournaient à pied. Une atmosphère de gaieté régnait au milieu de cette agglomération d’étrangers d’hier, amis d’aujourd’hui, séparés de demain. L’échange de propos badins, légers et parfois même un peu salés entretenait la bonne humeur de ces gens venus à Port-Joli pour flâner, mais que l’inactivité finissait par lasser. Pour se désennuyer, ils se rendaient en foule à l’arrivée du train de Québec. La même scène se renouvelait au quai, qui s’allonge dans le fleuve en éperon, quand La Mouche, petit yacht de plaisance transformé en bateau à passagers, annonçait, par le cri strident de sa sirène, qu’elle approchait du quai de Port-Joli. De ce petit vapeur débarquaient d’habitude les hommes de bureau, qui se servaient de ce moyen de transport pour se reposer un peu la tête du tintamarre de la ville en contemplant, trois heures durant, les rives enchanteresses du grand fleuve. À l’accostage de La Mouche, les mamans, tenant leurs enfants par la main, se précipitaient vers la passerelle et envahissaient le pont du navire, quand le moindre retard accompagnait le débarquement des passagers.

— Marche donc, la Grise ! T’as pas coutume de te traîner les pattes comme ça ! Ça sera pas long, Monsieur Reillal. Les chevaux, ça peut nous faire honte parfois ! Vous savez,