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Page:Lallier - Allie, 1936.djvu/96

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vités à entrer dans la salle du banquet. À ma grande surprise, un grand nombre de dames y attendaient l’arrivée de leurs maris.

Les décors étaient du meilleur goût et très appropriés à la circonstance. Au fond de la salle était déployée une large banderole aux couleurs canadiennes et sud-africaines, en face de laquelle on avait placé mon siège. On y lisait :

« Bienvenue au député des antipodes », « Le génie canadien à l’honneur », etc., etc.

Je respirais avec je ne sais quelle satisfaction cette atmosphère française, où régnait une franche gaieté. Je n’avais pas vu depuis longtemps tant de figures déridées à la fois. Je m’expliquais mieux comment nos frasques de jeunesse, dont plusieurs avaient eu l’hôtel du Plateau comme théâtre, tournaient toujours en plaisanteries : c’est que la gaieté française avait encore droit de vie dans le quartier latin de la métropole canadienne. Ce que je m’expliquais moins, c’étaient les motifs qui m’avaient poussé à m’enrôler dans le corps de génie canadien en partance pour la guerre des Boers, pour employer l’expression dont on se servait alors pour désigner la campagne militaire entreprise par les Anglais contre les Hollandais de l’Afrique du Sud. En présence de faits aussi inexplicables que celui-là, je m’étonne moins qu’il y ait des gens qui croient à la destinée.