— Oui, pour se faire bouter dehors par les Américains, qui noient notre territoire pour mieux s’en emparer ; (contredisant ce qu’il disait un instant auparavant). Après tout, j’en ai assez, continua-t-il. J’avais fondé de si belles espérances sur notre nouvelle terre. Nous avions transplanté des bords du Saint-Laurent une tige forte et féconde dans notre petite patrie nouvelle ; nous touchions déjà à la prospérité. J’avais payé la dette du procès avec le produit de la vente du bien ancestral et l’avenir me paraissait moins sombre, quand soudain nous avons dû fuir ces lieux qui nous étaient chers. Je comprends maintenant davantage l’amour de nos aïeux pour ce sol vierge qu’ils avaient arrosé et pour ainsi dire sanctifié de leurs sueurs. C’est cet amour du sol qui m’a été transmis de génération en génération. C’est là, que ce sang qui coule dans nos veines, avait puisé sa force. Ah ! la vieille terre de Verchères, la terre de mes ancêtres, la reverrai-je jamais ?
— Tu ne songes pas à retourner à Verchères ? avait timidement interrompu Madame Lescault, mais avec un éclair de joie significative dans ses yeux.
— Tu t’es toujours ennuyée, toi, au Lac-Saint-Jean, reprit l’époux qui avait tout saisi dans l’expression de bonheur reflétée dans les yeux de sa femme.
— Et toi ?
— Pour dire franchement, oui ! On ne se déta-