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Page:Lallier - Le spectre menaçant, roman canadien, c1932.djvu/171

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che pas si vite d’un si beau bien, quand on y est né et que dix générations y ont vécu. Je te l’avoue franchement, quand le marteau de l’encanteur a adjugé le dernier morceau, j’ai cru défaillir. J’étais si anxieux de quitter l’endroit qui avait été témoin de notre honte, que j’ai ramassé ce qui me restait de courage et de force pour les mettre au service de notre nouveau bien, que j’aimais presque autant que le premier, car, vois-tu, en défrichant cette terre, je devenais ancêtre à mon tour ; mais l’inondation s’est produite…

— Je ne puis croire que nous soyons été ainsi dépossédés, sans que nous ayons recours contre la « Compagnie », dit Madame Lescault, tout en tricotant un bas de laine pour son mari.

— Encore un procès ! Va donc plaider avec une Compagnie de multi-millionnaires, un pauvre habitant ruiné !

— À ce moment, le facteur frappa à la porte et c’est Madame Lescault qui ouvrit.

— Une lettre recommandée pour Pierre Lescault, dit-il.

— Une lettre recommandée pour moi ! Serait-ce le dédommagement de ma terre ? D’où vient cette lettre, facteur ?

— Voyons ! Ver… Ver… Ver… Verchères ! Ça vient du notaire Geoffrion.

Après avoir signé le livre du facteur, Pierre Lescault ouvrit la lettre et la présenta à sa femme pour en faire la lecture.

— Lis-donc, dit-il, l’écriture de notaire, ça n’est