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m’éviter la douleur d’une répétition et, ensuite, pour que la leçon leur profite.

— C’est très bien ! As-tu soupé, tu dois avoir faim ? dit nerveusement Madame Lescault.

— Un peu, je n’ai pas mangé depuis le matin. Après le procès, il a fallu aller chez le notaire.

— Chez le notaire ?

— Oui, eh bien… oui… chez le notaire ! Pour hypothéquer la terre !

— Pour hypothéquer la terre ? je n’y comprends plus rien !

— Eh bien, moi, je ne comprends que trop ; nous sommes ruinés, et il va nous falloir quitter Verchères !

Un moment de silence et d’énervement suivit cette remarque du fermier qui s’accouda sur ses genoux et prit sa tête entre ses deux mains.

— Le souper est servi mon vieux, si tu veux t’approcher ?

— Je ne souperai pas !

— Mais… tu viens de me dire que tu avais faim, et maintenant tu ne veux rien prendre ?

— Rien ! fut toute la réponse du père Lescault qui se passait la main dans les cheveux, comme s’il eût voulu les arracher de désespoir.

Les garçons, qui étaient allés dételer la blanche, rentrèrent à la maison et allèrent s’asseoir à l’autre extrémité de la cuisine.

— Mes enfants, dit Pierre Lescault, se tenant toujours dans la même position, le déshonneur a frappé la famille ; celui qui était votre frère a été