Page:Lamarck - Discours (1806).djvu/14

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dégradations : il la suit même d’autant moins qu’il a lui-même moins d’importance. Rech. sur les corps vivans, p. 41.

Il vous est facile de sentir que cela vient de ce que les organes les moins essentiels des animaux sont plus soumis que les autres aux influences des causes extérieures qui les modifient avec le temps en raison de leur diversité. Il en résulte, que pour ranger sans arbitraire les espèces et même les genres dans la série générale, on ne doit pas avoir la même facilité que pour placer dans cette même série les principales masses, c’est-à-dire les classes et les grandes familles[1].

Maintenant que les progrès de l’anatomie comparée nous ont fait connoître les principaux systêmes d’organisation dont le règne animal nous offre des exemples, qu’ils nous ont montré par les caractères qui distinguent ces systêmes, différens degrés dans la complication de l’organisation des animaux que chacun d’eux embrasse, et qu’enfin ils nous ont conduit, en fixant le rang que doit occuper chaque masse, c’est-à-dire chaque systême d’organisation, à déterminer, pour les animaux en général, un ordre qui n’a rien d’arbitraire, et que nous pouvons considérer comme l’ordre même de la nature ; je trouve dans ces importantes considérations des moyens très-suffisans pour soulever le voile épais qui nous cachoit le plus grand des secrets de la nature, celui qui est relatif à l’origine de tous les corps naturels.

Je ne dois pas aujourd’hui vous exposer comment la nature me paroît être parvenue à faire exister tous les corps naturels que nous observons, et qui font le sujet de vos études ; comment tous ces corps étant véritablement ses productions, il a suffi que quelques-uns d’entr’eux aient été formés directement par elle, tandis qu’elle n’a participé à l’existence de tous les autres qu’indirectement, les ayant fait successivement dériver des premiers, en opérant peu à peu et à la suite de beaucoup de temps, des changemens et une composition croissante dans l’organisation de ces corps vivans, et en conservant toujours par la voie de la réproduction les modifications acquises, ainsi que les perfectionnemens obtenus.

  1. On y peut cependant parvenir, car l’ordre de la nature entre les objets qui appartiennent à une classe, existe aussi réellement que celui qui concerne les classes elles-mêmes. Mais cet ordre entre les objets d’une classe est en général moins simple, forme le plus souvent une série rameuse, et de là se trouve beaucoup plus difficile à saisir.