Page:Lamarck - Philosophie zoologique 1873 tome 1.djvu/103

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pour la première fois favorise cette prévention, surtout lorsque le moindre intérêt y concourt, il en résulte que, quelques difficultés qu'il y ait à découvrir des vérités nouvelles, en étudiant la nature, il s’en trouve de plus grandes encore à les faire reconnaitre. Ces difficultés, qui tiennent à différentes causes, sont dans le fond plus avantageuses que nuisibles à l'état des connaissances générales, car, par cette rigueur qui rend difficile à faire admettre comme vérités les idées nouvelles que l'on présente, une multitude d’idées singulières plus ou moins spécieuses, mais sans fondement, ne font que paraître et bientôt après tombent dans l’oubli. Quelquefois, néanmoins, d’excellentes vues et des pensées solides sont, par les mêmes causes, rejetées ou négligées. Mais il vaut mieux qu'une vérité, une fois aperçue, lutte longtemps sans obtenir l’attention qu’elle mérite, que si tout ce que produit l’imagination ardente de l'homme était facilement reçu.

Plus je médite sur ce sujet, et particulièrement sur les causes nombreuses qui peuvent altérer nos jugements, plus je me persuade que, sauf les faits physiques et les faits moraux[1], qu’il n’est au pouvoir

  1. Je nomme faits moraux les vérités mathématiques, c'est-a-dire, les résultats des calculs, soit de qualités, soit de forces, et ceux des mesures; parce que c'est par l'intelligence et non par le sens, que ces faits nous sont connus. Or, ces faits moraux sont à la fois des vérités positives, comme le sont aussi aussi les faits relatifs à l’existence des corps que nos pouvons observer, et de bien d’autres qui les concernent.