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Le conseil de la commune s’honora en passant à l’ordre du jour sur cette pétition ; mais la Société régénérée s’appuyait sur Carpentier et Carrier et dénonçait les tièdes aussi bien que les suspects. Elle envoyait au comité de sûreté générale de la Convention un résumé de la correspondance de Palasne, en sollicitant la mise en jugement de ce député, parce qu’il avait trahi la confiance de ses concitoyens. Elle demandait d’employer les livres de théologie à faire des cartouches. C’est par son influence qu’on abattit les croix, qu’on supprima le mot saint, que Saint-Brieuc devint Port-Brieuc et la rue Saint-Guillaume, la rue Guillaume. C’est elle enfin qui prit l’initiative de l’inauguration du temple de la Raison, dans la ci-devant cathédrale (10 mars 1794) et dressa le programme de cette fête dégradante, « ouverte par une agréable symphonie et terminée par des chants patriotiques et des danses républicaines ». On y vit aussi deux apostats déposer leurs lettres de prêtrise et renoncer « au métier sacerdotal. » Des salves d’artillerie annoncèrent que la commune se régénérait, pendant que le président de la Société déclarait, aux applaudissements de l’assistance : « L’idole de la superstition vient enfin d’être renversée dans cette commune et nous n’adresserons plus nos vœux à ces images du fanatisme, depuis tant de siècles révérées. »

Pour bien marquer le triomphe de la Raison, on grava, sur la porte d’entrée de la cathédrale, cette inscription : temple de la Raison, surmontée d’un triangle aux rayons dorés. C’est là que furent célébrées les fêtes décadaires, sous la direction d’une commission chargée « de réunir l’utile à l’agréable, de faire oublier les cérémonies d’un culte exclusif et de corroborer l’esprit public. » Dans ce but, on ne trouva rien de mieux que d’appeler les fidèles à entendre la lecture des lois, des discours de morale, des hymnes patriotiques et le jeu des instruments. En même temps, des commissaires furent nommés pour maintenir le respect que doit imposer l’assemblée du peuple, et le comité révolutionnaire fut invité à surveiller ceux qui ne se rendraient pas au temple de la Raison. À cet enseigne-