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et il tomba percé de coups. C’était à peu de distance de sa demeure (évêché actuel), et non à la porte de la poudrière (tour nord de la cathédrale), dont il n’avait point la garde. Les clefs de la poudrière étaient entre les mains du capitaine d’artillerie Dambrine qui, se voyant arrêté, réussit à les mettre en sûreté[1].

  1. « Les brigands passoient par une rue conduisant à la prison et trainant une pièce de canon. Le président du département crut qu’elle étoit au pouvoir des républicains et sortit avec son fils, croyant se joindre à ces derniers. Il se jette par cette méprise au milieu des brigands qui le saisirent, lui enlevèrent son arme et se disposent à le fusiller sur l’endroit, lorsque par le plus grand des hazards il parvint à s’éclipser d’entre leurs mains. La pointe du jour arrivant, un peloton de troupes républicaines et de citoyens se rendit sur la place du département, fit un feu bien nourri sur l’ennemi qui y étoit en force et l’en débusqua précipitamment. À ce même instant, d’autres pelotons de troupes et de citoyens circuloient dans la ville et eu chassoient les brigands. À 1 heures, elle étoit entièrement évacuée. Lorsque l’on put vérifier le mal qu’avoit fait l’ennemi, on reconnu qu’il avoit emmené une pièce de 4 avec un coffret, laissant sur place l’avant-train. On trouva sur la place et dans les rues 7 habitants de la ville tués, au nombre desquels étoit le citoyen Poulain-Corbion père, commissaire du Directoire exécutif. Des gens qui étoient à portée d’entendre ce qui se passaient rapportent que ce fonctionnaire a préféré d’être immolé plutôt que de souiller la bouche de la provocation à la royauté. Arrêté par les brigands, ils lui demandèrent ou il alloit et qui il étoit. Je vais à la municipalité, dit-il ; je suis le commissaire du Directoire. Ah ! lui repartit-on, vous êtes le commissaire : c’est bon à savoir, vous serez fusillé à l’instant si vous ne criez vive le Roi. Non, dit-il, vive la République, et il est assassiné. On trouva aussi un gendarme tué, jeune homme de la plus belle conformation et d’une excellente conduite ; plus un musicien de la troupe. Neuf citoyens furent blessés plus ou moins grièvement, ainsi que le capitaine de la gendarmerie, 3 gendarmes, 3 militaires. On trouva aussi dans les rues 3 chouans tués, et dans une maison un blessé à mort. À deux portées de fusil de la ville, on trouva 8 autres chouans tués. On sait qu’ils ont eu beaucoup de blessés et que dans une maison qu’ils se firent ouvrir, ils en firent penser 15. On craignoit pour la poudrière, mais l’ennemi ne put y pénétrer, et ce bonheur est dû au sang-froid du citoyen Dambrine, capitaine au 8e régiment d’artillerie à pied, directeur du dépôt des munitions. Cet officier, en voulant venir au corps de garde de la place, fut pris par l’ennemi. Il avoit la clef de la poudrière en poche ; on le conduisit au poste, et en arrivant, il eut l’adresse de glisser la clef sous le lit de camp. On la lui demanda, il répondit ne l’avoir point et supposa qu’elle étoit avec le garde magasin logé à la caserne. On le garda au poste parce que l’on comptoit sans doute en tirer parti si on pouvoit ouvrir la poudrière ; mais les brigands ayant été chassés plutôt qu’ils ne le pensoient, il se trouva délivré. L’ennemi ne s’est pas non plus emparé des caisses publiques, et n’a même pas essayé de s’en emparer : il attendoit le jour pour commencer le pillage auquel on ne lui a point laissé le temps de se livrer. » (Extrait du rapport de l’administration centrale au ministre de la guerre. — Archives des Côtes-du-Nord.)