Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 8.djvu/336

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Kaled, qui voulut sur-le-champ parler à Djida ; elle lui dit qu’elle venait de la part de son cousin pour les unir, et lui apprit en même temps dans quel triste état elle l’avait laissé.

« Un tel mariage est désormais impossible, répondit Djida ; je n’épouserai jamais celui qui m’a refusée : mais j’ai voulu lui donner une leçon, et le punir de m’avoir tant fait souffrir. » Sa tante lui représentant que s’il lui avait causé quelque peine, il était en ce moment bien plus malheureux qu’elle : « Quand je devrais mourir, reprit Djida, je ne serai jamais sa femme. » — Son père n’étant pas encore de retour, la mère de Kaled ne put lui parler. Voyant d’ailleurs qu’elle n’obtiendrait rien de Djida, elle revint chez son fils, qu’elle trouva malade d’amour et très-changé ; elle lui rendit compte du résultat de sa mission, ce qui augmenta son désespoir et ses maux. « Il ne vous reste plus qu’un moyen, dit-elle : prenez avec vous les chefs de votre tribu et ceux des tribus vos alliées, et allez vous-même la demander à son père ; s’il vous dit qu’il n’a pas de fille, racontez-lui votre histoire, il ne pourra nier plus longtemps, et sera forcé de vous l’accorder. »

Kaled, à l’instant même, convoqua les chefs et les vieillards de la tribu, et leur fit part de ce qui lui était arrivé ; ce récit les frappa d’étonnement. « C’est une histoire merveilleuse, dit Mehdi-Karab, l’un d’eux ; elle mériterait d’être écrite à l’encre d’or. Nous ignorions que votre oncle eût une fille ; nous ne lui connaissions qu’un fils, nommé Giaudar : d’où lui vient donc cette héroïne ? Nous vous accompagnerons quand vous irez demander sa main ; personne n’en est plus digne que vous. »