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nesque et aventureux du génie de Gustave n’en est pas moins la grandeur de l’âme inquiète et agitée dans la petitesse de la destinée. Sa mort fit pousser un cri de joie aux Jacobins, ils déifièrent Ankarstroem ; mais l’explosion de leur joie en apprenant la fin de Gustave trahit le peu de sincérité de leur mépris pour cet ennemi de la Révolution.


IX

Ces deux obstacles enlevés, rien ne retenait plus la France et l’Europe que le faible cabinet de Louis XVI. L’impatience de la nation, l’ambition des Girondins et le ressentiment des constitutionnels blessés dans M. de Narbonne, se réunirent pour renverser ce cabinet : Brissot, Vergniaud, Guadet, Condorcet, Gensonné, Pétion, leurs amis dans l’Assemblée, le conciliabule de madame Roland, leurs séides aux Jacobins, flottaient entre deux partis également ouverts à leur génie : briser le pouvoir ou s’en emparer. Brissot leur conseilla ce dernier parti. Plus versé que les jeunes orateurs de la Gironde dans la politique, il ne comprenait pas la Révolution sans gouvernement. L’anarchie, selon lui, ne perdait pas moins la liberté que la monarchie. Plus les événements étaient grands, plus la direction leur était nécessaire. Placé désarmé sur le premier plan de l’Assemblée et de l’opinion, le pouvoir s’offrait à eux, il fallait le saisir : une fois entre leurs mains, ils en feraient, selon les conseils de la fortune et selon la