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Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 11.djvu/182

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bunes aux ondulations des assemblées populaires. Il semblait emporté lui-même par les passions qu’il étudiait ; mais il dominait ses emportements apparents. Toujours assez dans le flot du jour pour être national, et assez en dehors pour ne pas souiller son avenir. Sa famille était la meilleure partie de son patriotisme. Il en avait le culte et même le dévouement. À la nouvelle de la suppression du droit d’aînesse, il s’était jeté dans les bras de ses frères : « Heureuse loi, avait-il dit, qui permet à des frères de s’aimer sans jalousie ! Elle ne fait que m’ordonner ce que mon cœur avait déclaré d’avance. Vous le saviez tous, la nature avait fait entre nous cette loi ! » La guerre l’avait entraîné heureusement dans les camps, où tout le sang de la Révolution était pur. Son père avait demandé qu’il servît sous le général Biron, son ami. Il s’était signalé par sa fermeté dans ces premiers tâtonnements militaires de la demi-campagne de Luckner en Belgique. À vingt-trois ans, nommé général de brigade, à titre d’ancienneté, dans une armée où les anciens colonels avaient presque tous émigré, il avait suivi Luckner à Metz. Appelé par Servan au commandement de Strasbourg : « Je suis trop jeune, répondit-il, pour m’enfermer dans une place. Je demande à rester dans l’armée active. » Kellermann, successeur de Luckner, avait pressenti sa valeur et lui avait confié une brigade de douze bataillons d’infanterie et de douze escadrons de cavalerie.