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Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 11.djvu/219

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dissoute, prit la parole : « Représentants de la nation, dit-il, l’Assemblée législative a cessé ses fonctions, elle dépose le gouvernement dans vos mains ; elle donne aux Français cet exemple du respect à la majorité du peuple. La liberté, les lois, la paix, ces trois mots furent imprimés par les Grecs sur les portes du temple de Delphes. Vous les imprimerez sur le sol entier de la France. »

Pétion fut nommé président à l’unanimité. Les Girondins saluèrent d’un sourire ce présage de leur ascendant sur la Convention. Condorcet, Brissot, Rabaut-Saint-Étienne, Vergniaud, Lasource, tous les Girondins à l’exception de Camus, occupèrent les places de secrétaires. Manuel se leva et dit : « La mission dont vous êtes chargés exigerait une sagesse et une puissance divines. Quand Cinéas entra dans le sénat de Rome, il crut voir une assemblée de rois. Une pareille comparaison serait pour vous une injure. Il faut voir ici une assemblée de philosophes occupés à préparer le bonheur du monde. Je demande que le président de la France soit logé dans le palais national, que les attributs de la loi et de la force soient toujours à ses côtés, et que toutes les fois qu’il ouvrira la séance tous les citoyens soient debout. »

Un murmure d’improbation s’éleva à ces paroles. Le sentiment de l’égalité républicaine, âme de ce corps populaire, se révolta contre l’ombre même du cérémonial des cours. « À quoi bon cette représentation au président de la Convention ? dit le jeune Tallien, vêtu de la carmagnole ; hors de cette salle, votre président est simple citoyen. Si on veut lui parler, on ira le chercher au troisième ou au dernier étage de sa maison obscure. C’est là que logent le patriotisme et la vertu. »