Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 16.djvu/209

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Cédar et Daïdha, ravis d’étonnement,
Ne comprenaient plus rien à cet apaisement ;
Ils se croyaient, à voir ces choses renversées,
Transportés par un songe au monde des pensées :
Mais, le vieillard tardif ne les appelant pas,
À travers le jardin ils firent quelques pas,
N’appuyant leurs pieds nus qu’à peine sur la terre,
Se montrant chaque objet du doigt avec mystère,
Comme on marche à pas sourds sur des parvis sacrés.
Le gazon incliné formait de grands degrés ;
Ils suivirent en bas la pente de verdure,
Et leurs yeux du rocher revirent l’ouverture.
Elle était large et haute, et le front d’un géant
N’aurait pu la toucher debout en se dressant :
On eût dit qu’une race antique et colossale
Avait à sa grandeur taillé l’immense salle.
Les grands vents de la mer, dans cette arche de sol,
En brisant sur le cap s’engouffraient à plein vol ;
Les parois en vibraient comme un orgue sonore.
Les rayons que le jour y jette à peine encore,
Introduits à demi sous le roc habité,
En laissaient tout le fond dans son obscurité,
Et mêlaient les objets dans une demi-teinte
Où combattaient la nuit et la lumière éteinte.


Ils hésitaient d’entrer ; leur timide regard
Au fond de cette nuit cherchait le saint vieillard.
Les ténèbres encor leur cachaient sa figure ;
De ses lèvres pourtant le vague et sourd murmure