Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 16.djvu/210

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Des mots que prononçait dans sa distraction
Le prophète absorbé par l’adoration,
Le leur fit découvrir, dans le fond, en prière.
Le jour éblouissait, en entrant, sa paupière ;
Les époux le voyaient, mais lui ne pouvait voir
Leurs visages, cachés derrière un angle noir.
Il était à genoux devant un bloc de pierre,
Le visage et le corps tournés vers la lumière,
Les deux bras étendus au-dessus de son front,
Pareils à des rameaux qui s’élèvent d’un tronc,
Et de ses maigres mains les deux palmes dressées
Comme pour embrasser de célestes pensées !
Sous l’inspiration que son cœur lui versait,
Sur son cou replié son front se renversait,
Et son regard, en haut se cherchant une route,
Semblait lire le ciel à travers cette voûte.
Sur le bloc de granit qui lui servait d’appui
On voyait tout ouvert un livre devant lui ;
À leurs yeux ignorants ce livre, obscur mystère,
Semblait, prié par lui, le dieu du solitaire :
Quelquefois de sa lèvre il baisait le trésor.
Le livre était couvert d’une enveloppe d’or ;
Comme un charbon ardent, une énorme escarboucle,
En nouant le fermoir, flamboyait sur la boucle.
Sur l’or sculpté du livre, admirable ornement,
Une colombe bleue aux yeux de diamant,
De l’inspiration mélodieux symbole,
Ouvrait ses ailes d’or comme un oiseau qui vole.
Ses pattes de rubis et son bec de corail
Semblaient poser collés sur le dossier d’émail ;